La truffe noire fraîche : notre première fois !
La truffe noire tuber melanosporum est un produit d’exception. On le sait, tout ce qui est rare est cher, et, à 4200 € le kg place de la Madeleine à Paris, la truffe noire fraîche illustre parfaitement cette vérité, surtout après deux saisons de pénurie. Pour vous donner une idée de la facture finale, on conseille généralement de prévoir 10 g de truffe fraîche par personne. Il faut donc passer un certain cap psychologique pour concrétiser l’achat. Mais avant la mondialisation et ses excès, il faut se rappeler que beaucoup de produits aujourd’hui devenus courants étaient aussi peu accessibles : le cacao, le café, les épices et même le sucre étaient dégustés par une poignée de privilégiés, en petites quantités et certainement lors de rituels comparables à celui que je vais vous décrire plus loin.
Dans la boutique de truffes
La première chose qui m’a frappé en entrant dans la boutique était le fort parfum de truffe qui flottait dans un air humide. La boutique fait également restaurant ce qui accentue la présence du parfum que je ne connaissais jusqu’à présent que dans sa version synthétique. En parlant de version synthétique, j’ai été triste d’entendre que le client devant moi avait acheté une pièce de 50 g de truffe noire extra pour l’ajouter à un risotto mélangé à de l’huile de truffe. Sacrilège ! Car tous ces produits à base de truffe sont pleins d’arômes, parfois naturels, mais tout de même faux. Le malheureux fera donc goûter à ses invités la texture de la truffe, mais toutes ses saveurs seront écrasées par un arôme, quel gâchis, quand on sait que beaucoup n’auront jamais la chance de savourer ce produit rare et précieux.
La truffe noire tuber melanosporum, la vraie
La truffe noire tuber melanosporum se trouve exclusivement entre novembre et février. Attention donc aux truffes d’été et d’automne, presque dépourvues de saveur ! Attention également à ses cousines chinoises, que l’on dit aromatisées chimiquement. Les truffes d’été et d’automne permettent toutefois de découvrir la texture inédite de ce champignon hors du commun à tarif accessible, mais ne se suffiront pas à elles-mêmes. Il vous faudra les cuisiner et certainement utiliser un produit aromatisé pour obtenir un plat parfumé.
La truffe noire est très sensible au climat. Elle a besoin d’un début d’été chaud mais d’une mi-août – début septembre pluvieuse pour se développer. L’an dernier, la récolte a été très mauvaise, la météo avait été trop capricieuse. D’après les articles lus sur Internet, l’année 2016 est également compliquée. On n’a donc aucune peine à imaginer que le dérèglement climatique pourrait rendre le produit encore plus rare voire provoquer la fin de certaines truffières.
La dégustation : premières impression
Un parfum franc mais agréable traverse le sachet de transport, atteignant les narines par petites vagues. A la manière du paquet de café de retour de chez le torréfacteur. La truffe reste très légèrement humide au toucher, avec une peau striée d’un noir très profond. Lorsqu’on la coupe on découvre une chair plus claire, parcourue de veines blanches. Quelle esthétique !
Passons à table…
Nous avons choisi de déguster la truffe de la façon la plus simple, avec un œuf à la coque et une bonne bouteille de Crozes Hermitage. Il est conseillé de prévoir 10 g de truffe par personne, en sachant que la truffe est vendue entière, la plus petite que j’ai trouvée pesait 15 g. C’est elle qui m’a suivi dans le métro jusqu’à chez nous. L’ayant consommée le jour de l’achat, nous n’avons pas pu l’enfermer dans une boîte avec les œufs. La coquille de l’œuf étant poreuse, la colocataire ténébreuse aurait agréablement parfumé le blanc et le jaune. Pensez-y si vous choisissez de faire l’expérience de la dégustation de truffe.
Première bouchée : une mouillette de baguette fraîche trempée dans l’huile d’olive, une lamelle de truffe, de la fleur de sel. Petite déception sur cette bouchée, l’huile d’olive et le sel ont écrasé la saveur de la truffe, vite, passons à la suivante !
Deuxième bouchée : une mouillette de baguette fraîche beurrée et la lamelle de truffe. Le beurre doux n’écrase plus l’arôme délicat de la truffe, les saveur explosent lorsque la truffe s’écrase dans la bouche. Un régal…
Troisième bouchée : une mouillette de baguette fraîche trempée dans le jaune d’œuf et la lamelle de truffe. Le jaune mêlé à l’arôme délicat de la truffe fait merveille… finalement, le pain parasite un peu le plaisir de la texture si particulière de la truffe, prochaine bouchée, sans pain !
Quatrième bouchée : une cuillère de jaune et sa lamelle de truffe, simplement posée. On casse la truffe sur la langue dont le goût explose comme prévu en bouche, accompagné du goût et de l’onctuosité du jaune. Waouh, c’est le summum, la meilleure manière de la déguster !
Cinquième bouchée : il ne reste qu’une lamelle, coupons la en deux. On reproduit le scenario de la quatrième bouchée, que c’est bon !
Sixième bouchée : dernière demi-lamelle et plus de jaune d’œuf. Oui, on en a mangé simplement sur du pain, entre les bouchées à la truffe, pour faire durer le plaisir et profiter également d’un des plats les plus simples et les plus gourmands. La petite pointe de beurre s’acoquine très bien aussi avec le diamant noir et permet de finir la dégustation en beauté.
En conclusion
Une très belle expérience, que nous avons tous les deux beaucoup appréciée !
Si les produits aromatisés ont plutôt bien réussi à reproduire le parfum de la truffe, qui paraît familier lorsqu’on respire sa peau, ils sont finalement très éloignés du goût de la truffe fraîche et crue, car bien trop prononcés et grossiers ! J’imagine qu’une truffe noire cuite ou marinée a un fort pouvoir parfumant, mais sa saveur brute est très délicate et pas du tout « forte » comme on l’imagine quand on ne connaît que les produits dérivés ou en conserve. Si vous en avez l’occasion et la possibilité, je ne saurais que vous conseiller de vous offrir ce plaisir. Mais ne le partagez pas à plus de deux, prenez bien le temps, concentrez-vous bien sur votre ressenti et vous n’oublierez pas de sitôt ce dîner d’exception.
Comme tous les produits alimentaires inaccessibles, c’est leur rareté qui fait leur prix, beaucoup de produits infiniment moins chers, s’ils sont frais et bien faits, peuvent être tout aussi bons, objectivement ! Mais c’est toujours un grand plaisir d’enrichir son référentiel de saveurs et de conserver un souvenir gustatif que l’on n’est pas prêt d’oublier.
c’est vrai que si on met une truffe dans un bocal avec des oeufs, les oeufs prennent un délicieux parfum ! j’ai testé l’an dernier on s’était régalé
mélangé avec du beurre c’est sympa aussi car les matières grasses vont fixer les arômes de la truffe
tu as dû te régaler !